dimanche, septembre 13, 2009

Sans ma barbe, quelle barbe, ou des histoires de clodos parce qu'on a rien d'autre à dire.

Le matin, comme beaucoup de monde, je prends mes petits pieds pour me rendre au travail. Malheureuse petite créature que je suis, soumise à la cruauté d’un univers lui-même assujetti aux lois du capitalisme sauvage. Je dois donc, comme (presque) nous tous, mettre un réveil cinq jours sur sept pour aller gagner ma croute.
Seulement, d’aucuns sont bien plus ingénieux que nous, piètres salariés, et refusent de se plier à ces règles de requins. Et c’est de l'un de ces personnages que je vais aujourd’hui vous conter la fleurette.
Je l’ai appelé le Capitaine, tout simplement parce qu’il est vêtu d’un costume militaire et que je ne saurais identifier son grade ; dans le doute je le place parmi les grands dirigeants parce qu’il ne mérite pas d’être traité d’imposture de bidasse.
Je n’avais jamais vu le Capitaine avant ces dernières semaines. Peut-être parce qu’il n’était pas encore là, peut-être parce que mes sécrétions oculaires obstruaient mes matinales visions.
A coté de l’arrêt de bus, sur un large plaid, accompagné d’un caniche en fin de vie, de deux chats noirs affublés de clochettes de mouton, le Capitaine trône sur un fauteuil roulant, arborant le même mélange improbable de fierté et de résignation que ses bestiaux.
Comme à côté de ses félins est posé un tupperware de croquettes laissées à leur disposition, j’imagine que le pâté qu’il étale sur un vieux morceau de pain rassis a été subtilisé à la surveillance du chien agonisant qui n’a même plus le reflexe de protéger sa potée.
Devant lui sont disposés, sur une table pliante de camping accompagnée de deux tabourets assortis, deux échiquiers, sur lesquels tous les pions sont ordonnés pour entamer une partie dès potron-minet.
Il ressemble à un de ces clodos de films américains qui gagnent leur vie en défiant le chaland à une partie d’échec dans Central Park. Peut-être qu’un matin je mettrai mon réveil une demi-heure plus tôt pour aller me faire laminer à un jeu vieux comme le monde par un homme du même âge - comme en témoigne son interminable barbe blanche.
Allumons donc des cierges pour faire en sorte que ma curiosité devienne plus forte que ma flemme. Dommage que je sois athée ceci-dit.

1 commentaire:

Moi a dit…

Roque and roll oh yeah!